Le surlendemain des événements de la rue Mallemort...

Le surlendemain des événements de la rue Mallemort, Mlle de Bellechasse se présenta chez M. du Monceau, comme à son habitude. Cette fois encore, Édouard lui proposa de la raccompagner, et elle accepta à nouveau. Le jeune homme en profita pour lui raconter toute l’histoire, dont on ne cessait de parler dans le quartier.

"Et dire que je suis passé tout près de là juste avant que tout cela ne se produise! Comme j’aurais aimé en être témoin. Ou, mieux, être des leurs! Celui qui a décidé de l’issue de la bataille vient d’être promu lieutenant, et il n’a que 21 ans! Il est plus jeune que moi!"

Comme Marie-Jeanne n’avait rien répondu, il se retourna vers elle. Son expression en était une d’étonnement. Elle ouvrit la bouche pour parler, avant de la refermer. Elle répondit finalement :

"Savez-vous comment il se nomme?
- Attendez que je me rappelle... D'Artagnan! Oui, c'est cela, d'Artagnan! Il paraît que même son laquais est devenu sergent! C'est l'homme de grande taille monté sur un superbe cheval qui l'a dit comme je passais devant l'hôtel des mousquetaires!"

Ils marchèrent en silence, Édouard pensant à la vie fabuleuse qu'il aurait pu mener s'il était devenu mousquetaire, Marie-Jeanne regardant distraitement le paysage. Sondain, elle l'arrêta:

"Vous auriez aimé être mousquetaire, dites-vous?
- Oh oui!
- Et bien, puisqu'il semble qu'un laquais qui fait ses preuves peut obtenir de l'avancement, que diriez-vous de devenir celui de M. d'Artagnan, puisqu'il a perdu le sien?
- Moi, devenir laquais? Mais vous n'y pensez pas! De quoi aurais-je l'air?
- Vous ne seriez pas n'importe quel laquais, tout de même. Regardez, celui-ci est devenu sergent. Vous pourriez apprendre beaucoup auprès de M. d'Artagnan et vous faire valoir. Vous semblez aimer l'action, c'est cela qu'il vous faut!
- Et mon père? Car enfin, je ne serais plus auprès de lui, et je ne pourrai pas plus lui rapporter de l'argent...
- Votre père serait sûrement content de vous voir rendre service à un gentilhomme tel que M. d'Artagnan. Et puis... J'ai une idée...
- Oui?
- Vous me promettez le secret?
- Mais oui!
- Car enfin, les soeurs ne seraient peut-être pas ravies d'apprendre ce que je vais vous dire... Alors il faudrait que cette conversation reste entre nous.
- Vous avez ma parole, mademoiselle.
- J'ai un petit héritage, duquel je tire les revenus dont j'ai besoin pour assurer ma subsistance jusqu'à ce que je prenne le voile définitivement. Je comptais, bien entendu, le remettre intégralement aux bonnes oeuvres lorsqu'il ne me serait plus nécessaire. Mais j'aime les jeunes hommes plein de projets comme vous. Si vous vous engagez au service de M. d'Artagnan, je vous promets de prendre soin de votre père et de lui verser une petite somme pour lui venir en aide.
- Vous feriez cela? Oh! s'écria Édouard, profondément touché par la générosité de cette jeune femme.
- Bien sûr, répondit-elle avec un doux sourire.
- D'accord... je m'informerai pour savoir si la chose est possible. Vous êtes vraiment une bonne conseillère, mademoiselle!
- Mais de rien... et tenez-moi au courant! Mais rappelez-vous, ne laissez échapper aucun mot de ceci à personne, car cela pourrait me nuire.
- Oh, ne craignez rien! Comment pourrais-je trahir une généreuse personne telle que vous?"

Marie-Jeanne lui répondit de son plus beau sourire. Ils firent le reste du chemin joyeusement.

"Et dire que je suis passé tout près de là juste avant que tout cela ne se produise! Comme j’aurais aimé en être témoin. Ou, mieux, être des leurs! Celui qui a décidé de l’issue de la bataille vient d’être promu lieutenant, et il n’a que 21 ans! Il est plus jeune que moi!"

Milady eut un soupçon... Elle savait d'Artagnan vivant et se demanda combien de mousquetaires de 21 ans pouvaient être considérés pour un grade de lieutenant... Cette pensée lui donna le vertige, et elle allait s'emporter en posant sa question, mais elle devait absolument se contenir et se retint juste à temps. Elle prit le temps de respirer avant de demander:

"Savez-vous comment il se nomme?
- Attendez que je me rappelle... D'Artagnan! Oui, c'est cela, d'Artagnan! Il paraît que même son laquais est devenu sergent! C'est l'homme de grande taille monté sur un superbe cheval qui l'a dit comme je passais devant l'hôtel des mousquetaires!"

Milady eut un haut-le-coeur. Non seulement d'Artagnan n'était pas mort ou, tout au moins, emprisonné, mais il était lieutenant! Elle aurait voulu hurler sa rage! La vie lui semblait si injuste! Mais que pouvait-elle faire maintenant?

Elle tenta de voir clair dans sa situation. D'Artagnan était lieutenant, soit, mais au moins, elle savait maintenant ce qu'il était devenu. Il lui faudrait trouver un moyen de s'approcher de lui. Qu'avait-elle à sa disposition? Elle ne pouvait compter sur personne, hormis sur elle-même et son génie infernal. Elle avait également une partie de sa fortune de jadis, placée chez un homme d'affaire. Elle avait pu la récupérer sans éveiller de soupçons, l'homme ne s'inquiétant pas de connaître ses clients, du moment où les signatures étaient semblables et qu'ils n'exigeaient pas trop en intérêts. On pouvait toujours acheter les gens, mais Édouard, quoique peu rusé, ne lui sembla pas suffisamment niais pour se laisser ainsi acheter sans poser de questions. Il lui fallait trouver un moyen plus ingénieux.

Soudain, elle eut un éclair!

"Vous auriez aimé être mousquetaire, dites-vous?
- Oh oui!
- Et bien, puisqu'il semble qu'un laquais qui fait ses preuves peut obtenir de l'avancement, que diriez-vous de devenir celui de M. d'Artagnan, puisqu'il a perdu le sien?
- Moi, devenir laquais? Mais vous n'y pensez pas! De quoi aurais-je l'air?
- Vous ne seriez pas n'importe quel laquais, tout de même. Regardez, celui-ci est devenu sergent. Vous pourriez apprendre beaucoup auprès de M. d'Artagnan et vous faire valoir. Vous semblez aimer l'action, c'est cela qu'il vous faut!
- Et mon père? Car enfin, je ne serais plus auprès de lui, et je ne pourrai pas plus lui rapporter de l'argent...
- Votre père serait sûrement content de vous voir rendre service à un gentilhomme tel que M. d'Artagnan. Et puis... J'ai une idée...
- Oui?
- Vous me promettez le secret?
- Mais oui!
- Car enfin, les soeurs ne seraient peut-être pas ravies d'apprendre ce que je vais vous dire... Alors il faudrait que cette conversation reste entre nous.
- Vous avez ma parole, mademoiselle.
- J'ai un petit héritage, duquel je tire les revenus dont j'ai besoin pour assurer ma subsistance jusqu'à ce que je prenne le voile définitivement. Je comptais, bien entendu, le remettre intégralement aux bonnes oeuvres lorsqu'il ne me serait plus nécessaire. Mais j'aime les jeunes hommes plein de projets comme vous. Si vous vous engagez au service de M. d'Artagnan, je vous promets de prendre soin de votre père et de lui verser une petite somme pour lui venir en aide.
- Vous feriez cela? Oh! s'écria Édouard, profondément touché par la générosité de cette jeune femme.
- Bien sûr, répondit-elle avec un doux sourire.
- D'accord... je m'informerai pour savoir si la chose est possible. Vous êtes vraiment une bonne conseillère, mademoiselle!
- Mais de rien... et tenez-moi au courant! Mais rappelez-vous, ne laissez échapper aucun mot de ceci à personne, car cela pourrait me nuire.
- Oh, ne craignez rien! Comment pourrais-je trahir une généreuse personne telle que vous?"

Milady avait grand peine à se retenir de hurler... de joie! Cinq minutes plus tôt, elle était en proie à une fureur épouvantable, et maintenant elle était euphorique! Elle entrevoyait déjà sa bataille à venir contre d'Artagnan, qui ne pouvait se douter de rien! Elle rentra à sa chambre, se regarda dans le miroir, vit son sourire machiavélique dans le reflet et se laissa tomber dans le lit en éclatant de rire! Pour la première fois depuis longtemps, elle se sentait revivre! Milady était revenue à la vie!

Pendant ce temps, Édouard revenait chez lui, se demandant comment il s'y prendrait pour rencontrer d'Artagnan. Il passa devant l'hôtel à la même heure que l'avant-veille, et cette fois encore il vit le grand mousquetaire à la magnifique monture passer la grille d'entrée. Cependant, cet homme l'intimidait, et il ne savait trop comment l'aborder. Comme il l'approchait, il se rappela que s'il voulait se montrer digne d'être au service du lieutenant d'Artagnan, il devait se montrer fier et brave. Il releva donc la tête et les épaules et s'approcha résolument du grand homme.

"Bonjour Monsieur!"

L'homme se retourna et fut étonné de constater que c'était à lui qu'on s'adressait. Édouard se sentit comme un nain à côté de cet homme en uniforme qui, non seulement était grand lorsqu'il était debout, mais paraissait encore plus haut ainsi monté sur son cheval, alors que lui était à pied, dans ses habits un peu négligés. L'homme lui répondit:

"Oui, Monsieur?"

Édouard prit le ton le plus assuré qu'il lui était possible de prendre en cette circonstance, et commença:

"Vous connaissez le chevalier d'Artagnan?
- Oui, j'ai cet honneur.
- J'ai entendu dire qu'il n'avait plus de laquais.
- Diable! Les nouvelles vont vite! En effet, son laquais vient tout juste d'être nommé sergent et quittera son service sous peu... Mais quelle importance?
- J'ai toujours admiré les mousquetaires. Sans être tout à fait de votre calibre, je sais manier l'épée, mais la Providence n'a pas voulu que je puisse poursuivre dans cette voie. Je suis libre et à la recherche d'une situation, et il me plairaît bien d'entrer au service de M. d'Artagnan. Peut-être pourriez-vous lui parler de moi?
- Quel est votre nom?
- Je suis Édouard du Monceau.
- Et vous savez qu'un mousquetaire est fort exigeant, et que la vie à son service n'est pas de tout repos?
- Non seulement cela ne me fait pas peur, mais cela m'emballe, monsieur!
- Très bien, M. du Monceau, je transmettrai votre message à M. d'Artagnan lors de notre prochaine rencontre. Je termine mon service ici tous les deux jours, à cette heure, sauf les dimanche. Vous pourrez repasser et je vous ferai part de son avis.
- Merci. Vous êtes monsieur?
- Porthos. Au revoir, monsieur... monsieur...
- Du Monceau. Au revoir, M. Porthos!"