Nouvelle et désespoir...

-A ce bal, Aramis... Parmi les invités, il y avait un anglais et une espagnole, n'est ce pas...

D'Artagnan restait muet, les yeux fixés sur Aramis, cherchant à capter son regard.
Finallement, il réussit à l'accrocher; juste après qu'Athos eut parlé. Il sembla hésiter, cherchant les mots qui lui permettraient d'exprimer sa pensée, sans pour autant agresser son ami, et Dieu sait qu'il en avait une furieuse envie ! Une furieuse envie de le prendre par les épaules et de le secouer en lui criant : "Ah, ca, ami ! En avez-vous fini avec vos cachoteries ? Dans quelles histoire compliquée vous êtres vous encore vautré de délectation et Mordious ! Pourquoi diantre ne pouvez vous pas aimer les choses simples comme nous tous, Morbleu!"

Mais au lieu de cela, il esquissa un sourire conciliant, quoique légèrement ironique, et lança à son ami :

- Allez-y Aramis. Dîtes-nous donc ce que vous avez à dire, ou ce que vous voudrez bien partager avec les pauvres béotiens que nous sommes.

Athos tourna les yeux vers d'Artagnan et devina l'état d'énervement dans lequel il se trouvait, derrière sa façade posée. Lorsque le gascon s'adressa à Aramis, d'une voix mesurée, mais pleine de sarcasmes, Athos lui posa une main sur le bras pour l'inciter au calme. Après tout, leur ami était toujours passablement faible.

Même si Athos partageait, quelque part, l'agacement de son jeune ami face à la propension d'Aramis à se jeter dans n'importe quelle cabale pour les beaux yeux d'une femme.

Aramis regarda un moment ses amis, mesurant le degré de tension qui s'était établi, même inconsciemment, dans la petite pièce. Allait-il reculer, dès lors qu'il avait commencé à leur dévoiler un peu plus de ses activités? Il ne savait... Il lui semblait que ce faisant, il n'obtiendrait guère l'approbation du comte, pointilleux sur l'honneur et la droiture. Or cette approbation d'Athos avait beaucoup d'importance pour lui, il devait se l'avouer. Et puis... Révéler de telles choses ne précipiterait-il pas ses compagnons au coeur même de l'intrigue, si périlleuse?

Il se mordit les lèvres légèrement. Puis il se lança.

- L'arrivée de Buckingham à Paris n'était pas un hasard, et son retour au moment de l'affaire des ferrets ne l'était pas non plus. La fausse lettre envoyée au duc anglais n'était pas le fait de Son Eminence pour piéger la reine. À la vérité, je suis celui qui a envoyé cette lettre, également l'instigateur du complot des ferrets, et par extension du siège de la Rochelle...

Aramis avait légèrement pâlit en prononçant les dernières paroles. Il attendit, incertain, la réaction de ses amis.

Athos, surhumain par le sang-froid et l'empire sur lui même dont il faisait montre en toute circonstance, pour cette fois ci, pâlit et écarquilla les yeux de surprise. Il se doutait qu'Aramis avait toujours été plus profondément impliqué dans les intrigues des grands politiques du royaume qu'il ne voulait bien l'avouer, mais pour cette fois...

-Complot des ferrets... Oui, j'avais bien deviné, alors... Murmura t-il. Mais vous, déclencheur du massacre de La Rochelle...

Athos jeta un coup d'oil à d'Artagnan et Porthos, qui faisait pour le coup au moins la même tête que lui. Le comte ne put que regarder Aramis, son coeur et ses yeux attendant une explication.

D'Artagnan ne put s'empecher de lever les yeux au ciel, son irritation avait fait place à un rien d'amusement.

- Enfin, Aramis, je ne vous demande pas non plus, tel le christ, de prendre tous les péchés du monde et de les porter sur vos épaules ! Il suffisait de dire que vous aviez quelquechose à voir avec cela. Buckingham était bien chez vous cette nuit là ! Je l'avais pris pour vous lorsqu'il cheminait au bras de Constance, vous aviez la même allure, la même taille. ..Aramis, vous ressembliez au Duc du temps de son vivant...Cette ressemblance a du frapper aussi la duch...

- D'Artagnan, de grâce, taisez-vous !

(A toi, amiga, je t'attends...)

Aramis n'avait pu s'empêcher, pâle, de laisser échapper cette exclamation. Frémissant, il dévorait presque des yeux la physionomie du gascon, surpris au-delà de toutes mesures par les paroles de son ami... Jusqu'où donc allaient les connaissances d'Artagnan sur cette affaire?

Il fit un effort suprême sur lui-même, pour reprendre son air calme et composé. Mais inconsciemment, il enfonçait ses ongles dans ses paumes, faisant légèrement blanchir ses jointures.

-Aramis, nous sommes vos amis, non pas vos juges. Dit Athos a voix basse, mais ferme.

- Je sais que vous voyiez Mademoiselle Marie Michon, souvent, avant que le roi ne la chasse vers ses terres de Tours. Je sais qu'elle vous rendait visite, elle, amie de la reine, et que ma Constance vous rendait visite aussi, en tant que messagère de la reine. Elle était la courroie de transmission entre les deux amies. Je pense qu'elle l'a été aussi entre vous et le Duc quand il est venu en France. Si je ne me trompre, Constance était déja au service de la reine en 1624 ? Alors, ce petit manège aura duré bien longtemps. ..

- Je ne comprends rien du tout, dit Porthos. La reine et Marie Michon était amies ? La Duchesse de Chevreuse a du en être affectée ! Que la reine lui préfère une suivante !

- Taisez-vous Porthos, ordonna doucement Athos, en réprimant un sourire.

- Ah, d'Artagnan, j'aimais mieux le temps où vous vous contentiez de ramassez mes mouchoirs...

( HJ : Il's up to you René...)

D'Artagnan a écrit:

Elle était la courroie de transmission entre les deux amies.

(HR: <<<fais sa mauvaise langue: dites moi, cher Artagnan, vous êtes bien câlé en mécanique automobile, pour un mousquetaire )

vous si apparemment !!

-Je sais que vous voyiez Mademoiselle Marie Michon, souvent, avant que le roi ne la chasse vers ses terres de Tours. Je sais qu'elle vous rendait visite, elle, amie de la reine, et que ma Constance vous rendait visite aussi, en tant que messagère de la reine. Elle était le Hermès messager entre les deux amies. Je pense qu'elle l'a été aussi entre vous et le Duc quand il est venu en France. Si je ne me trompre, Constance était déja au service de la reine en 1624 ? Alors, ce petit manège aura duré bien longtemps. ..

- Je ne comprends rien du tout, dit Porthos. La reine et Marie Michon était amies ? La Duchesse de Chevreuse a du en être affectée ! Que la reine lui préfère une suivante !

- Taisez-vous Porthos, ordonna doucement Athos, en réprimant un sourire.

- Ah, d'Artagnan, j'aimais mieux le temps où vous vous contentiez de ramassez mes mouchoirs...

D'Artagnan comprit qu'il n'aidait guère Aramis à se confesser et résolut de l'éclairer en lui disant ce qu'il savait.

- A la Rochelle, vous vouliez partir à Londres prévenir Buckingham du danger qui le menaçait. Athos vous en a dissuadé : vous auriez été déserteur et traître. Vous nous avez proposé aussi les services de Marie; mais nous n'avons pas voulu prendre pour elle un pareil risque. Finallement, j'ai envoyé PLanchet, inutilement...Mais peut être allez-vous me dire depuis combien de temps vous connaissiez le duc de Buckingham ?

Aramis réfléchit quelques secondes à ce qu'il allait dire... Il savait que de sa réponse dépendrait la sûreté future de ses amis, et pour rien au monde il ne voulait qu'il leur arrive quoi que ce soit... C'était d'ailleurs l'unique condition pour qu'il accepte la fameuse offre... Il éluda donc la question.

- Au moment où vous êtes arrivé à Paris, D'Artagnan, cela devait bien faire près d'une année que l'intrigue était amorcée...

Une intrigue qui avait beaucoup évolué au fil de ces quatre années...

-A ce point là ? Murmura Athos. Je ne vous demanderait pas jusqu'à quel point vous êtes impliqué là dedans, je crois que je le devine assez... Mais je crains par contre pour votre vie, Aramis. Il fait mauvais de se hisser à côté des hautes têtes à l'horizon des complots...

Athos s'interrompit quelques secondes, semblant réfléchir, puis reprit :

-L'attaque dont nous avons été victime l'autre jour entérinne ce que je viens de dire, n'est ce pas ?

Aramis haussa légèrement les sourcils à cette question, puis secoua doucement la tête.

- Non, Athos, en la circonstance, les Huguenots sont bien les derniers desquels je m'attendais à une attaque comme celle que nous avons essuyé. Voilà le pourquoi de cette lettre que j'ai remise à Bazin tout à l'heure.

Aramis posa sa main droite sur sa poitrine, à l'endroit de la blessure faite et qui avait failli lui être si fatale. Une blessure faite par un huguenot... Alors qu'il avait des liens avec eux depuis plusieurs années... Il fronça les sourcils, pensif

- Non, cette attaque a bien évidemment d'autres origines que j'ignore encore. Quelqu'un derrière tire les ficelles de ces Huguenots extatiques et fanatiques. Il me faut savoir qui.

-Qui pourrait chercher à renverser Richelieu en employant un pareil moyen ?

La question d'Athos fit tressaillir Aramis, qui plongea son regard au plus profond des yeux de son ami. Saurait-il? Non, impossible, Athos, sachant cela, Athos se détournerait de moi, renierait notre amitié...

Il fronça légèrement les sourcils, à nouveau pensif. Il se devait de prendre pareille hypothèse en considération. Richelieu tombé, c'était Richelieu découvert, fouillé et tous ses secrets dévoilés. Richelieu tombé, c'était aussi tous ses agents dévoilés... C'était le dévoilement de tous les liens à double sens avec deux puissances deux fois ennemies... C'était la mort assurée pour lui, et peut-être aussi pour ses compagnons...

Il ferma un instant les yeux, incapable de soutenir le noble regard d'Athos plus longtemps. Il lui faudrait avouer ces liens s'il voulait protéger leur vie...

( HJ : Ben non, c'est juste logique.... Si quelqu'un manipule les huguenots pour prendre les armes contre un avis du roi - donc de Richelieu - c'est que ce quelqu'un en veut au roi - en fait à Richelieu :p- )

Athos, qui regardait Aramis dans les yeux, crut déceler aux fond des iris noirs de son ami, quelque chose comme de la culpabilité. Le jeune mousquetaire détourna le regard à ce moment là, Athos ne put que lui dire :

-Je vais vous le répéter, Aramis : nous sommes vos amis, et pas vos juges. Ne l'oubliez pas, je vous en supplie.

... Mais pas tout de suite...

La perspective de voir le visage noble d'Athos se détourner de lui avec dégoût fit légèrement pâlir le jeune homme. Lorsqu'il quittait les yeux d'Athos, il rencontrait le regard d'Artagnan, inexorable.

La tête lui tourna, et son regard s'obscurçit un moment. Le trop plein d'émotion, sa chute de l'après-midi, la perte de sang... Tout cela affaiblissait Aramis, qui pâlit ou plutôt blêmit cette fois sous l'étourdissement. Il porta une main à son front, tentant de reprendre ses esprits, le coeur bouleversé, ses pensées défilant à une vitesse vertigineuse dans son esprit.

Athos vit Aramis changer de couleur et se rejeter en arrière sur ses oreillers, l'oeil couleur d'orage et la main couleur de cendre. Il tremblait légèrement. Athos se leva.

-Aramis ? Que vous arrive-t-il ? Votre blessure serait-elle.... ?

Le comte s'approcha de son ami, et vit sur ses joues ordinairement nacrées le pourpre de la fièvre qui s'allume.

-Il faut appeler quelqu'un... Grogna Athos, et posant une main sur le front du jeune abbé.

Bazin, qui entrait au moment où Athos prononçait ces parole, posa un instant son regard sur son maître, puis pâlit presque autant que celui-ci.

- Monsieur Aramis fait une rechute?

-Oui... Va chercher le médecin, Bazin.

Athos alla ouvrir le pourpoint d'Aramis, et lui écarter ses couvertures.

-Il est brûlant de fièvre, morbleu...

D'Artagnan sortit de la réserve où il s'était réfugié depuis une minute.

- Nous avons trop fatigué Aramis. Il faut qu'il se repose avant tout pour pouvoir se remettre. De plus, Aramis ne sait pas plus que nous qui nous a réellement attaqué en fait, et pourquoi... Laissons le se reposer. Bazin prendra soin de lui avec le médecin.

- D'Artagnan a raison, rencherrit Porthos. Je vais rester avec notre ami pendant que Bazin va chercher le médecin. Rentrez dès maintenant. J'en ferai de même. Nous prendrons des nouvelles d'Aramis demain. Laissons là toutes ces histoires, et soyons simplement prudents quand nous sortons, c'est tout !

- Porthos est la sagesse incarnée, reprit d'Artagnan. Pardonez-nous , Aramis, d'avoir insisté autant et reposez-vous. Pour le reste de cette mystérieuse affaires, il sera bien temps d'en parler quand vous irez mieux...

Aramis ne répondit que par une poignée de main reconnaissante au jeune gascon. Il lui sourit. Les deux amis sortirent la mine sombre, tandis que Porthos restait au chevet d'Aramis et que Bazin courait chercher le médecin à nouveau.

Lorsque celui-ci fut arrivé, il força presque Porthos et le pauvre Bazin hors de la chambre.

Pour Aramis, la nuit ne fut qu'une longue bataille...