Une visite...

Vaudois, en quittant ses amis, ne prit pas même le temps de rentrer chez lui. Il piqua de nouveau des deux et s'élança par le quai des Tuileries en direction du Cours la Reine.
Vaudois galopa ainsi durant une heure, dans la nuit, la tête assaillie de mille idées folles.

Il était trois heures du matin quand il s'arrêta enfin à Auteui devant la porte d'une maison d'apparence modeste. Il descendit alors prestement de sa monture et vint tambouriner contre la porte.

-Ouvrez, ouvrez, je vous en prie!

Mme Brindvak, nourice de son état, entrouvrit un oeil vitreux, lorsqu'elle entendit les échos d'un bruit de porte du fond de son sommeil. Elle se leva en grommelant, enfila une robe de chambre, et alla ouvrir.

-M. Vaudois ! S'exclama t'elle en reconnaissant le gentilhomme qui la payait.

(HRP: Bon, on va dire que Vaudois ne comprend pas le ch'ti, parce que sinon, il n'aurait jamais confié un enfant à cette nourrice-ci, vu son nom! Brindvak!!!tssss



Vaudois salua d'un air distrait et pressé la plantureuse nourrice qui se tenait devant lui, joues rouges et teint frais, tandis que ses regards avides plongeaient à l'intérieur de la maison.. Il la poussa du bras et entra précipitamment.

-Où est-il, où est l'enfant?l Demanda-t-il essouflé.

( HJ : )

Mme Brindvak s'écarta pour le laisser rentrer, et grogna, mécontente d'avoir été tirée du lit pour autre chose qu'un salaire à toucher :

-Il dort, le petiot... Comme tout le monde à cette heure ci...

Vaudois ne fit pas même mine de relever la réflexion désobligente de la nourrice. Une seule chose comptait à ses yeux à cette heure.
-Où est-il? Puis-je le voir?

La nourrice émit un grognement renfrogné, dont la si formidable puissance sonore réussit à dominer le ronflement du mari. Sa force parvint enfin à retenir l'attention du visiteur nocturne.
Vaudois eut un sourire et porta la main à sa poche. A ce geste, les yeux de la nourrice semblèrent retrouver un éclat plus proche de l'humanité que du bovin ensommeillé.

Mme Brindvak ( HJ : décidémment j'adore ce nom XD ) prit en souriant la bourse que lui tendait Vaudois, et alluma une chandelle.

-Par ici, monseigneur.

Elle le conduisit à l'étage, dans une petite chambre pauvrement pourvue, mais cependant propre. Là, dans un petit lit en bois, poussé dans un coin de la pièce, et baigné par la lumière d'un rayon de lune qui filtrait à travers le rideau, une petite forme était roulée en boule sous la couverture de laine grise.

VAudois resta longtemps à considérer la petite forme qui s'agitait dans son sommeil.

Autour de lui, la nourrice s'activait, courant en tout sens, dans l'espoir d'obtenir une substancielle rallonge à la bourse pourtant bien pleine que lui avait déjà tendue Vaudois. MAis le gentilhomme ne lui prêtait pas attention, perdu dans la contemplation du garçonnet endormi. Dépitée, la nourrice quitta la pièce dans un grognement.

Vaudois s'approcha lentement du petit lit. L'enfant poussa un faible gémissement, du fond de ses rèves, et écarta la couverture d'un mouvement las. Vaudois eut un faible sourire. Lui, habituellement si froid, si détaché de toute chose, se sentit brusquement maladroit. Tout lui faisait peur et à peine osait-il respirer, de crainte de troubler le léger sommeil de l'enfant. Enfin, il n'y put résister et se pencha doucement vers le petit être fragile.

Les cheveux blonds collaient par mèche au petit frond humide des vapeurs du rève et la respiration calme attendrit Vaudois. Avec une tendresse infinie, d'une main presque tremblante, le gentilhomme les écarta avec douceur. L'enfant gémit de nouveau et se retourna dans son sommeil.

Un ciel pâle, des arbres nus... Un soleil invisible éclaire un chemin désert et boueux, qui serpente loin, loin vers l'horizon, de plus en plus mince, de plus en plus sinueux, comme un avenir innaccessible qui vous narguerait du haut de son idéalité. Deux yeux de petits garçons tendent la main vers ce chemin...

C'est un rêve, car les oiseaux sont muets. Pas un son ne filtre, ou seulement comme à travers plusieurs épaisseurs de coton. C'est un rêve, car la lumière est grise.

C'est un rêve, car il ne voit pas le visage de la femme blonde qui se penche sur lui, comme pour l'embrasser, mais qui se ravise et disparaît aussitôt. Disparaît de nouveau.

Alors il se retrouve seul, encore, au pied du chemin sans fin qui devrait le conduire vers un futur bleu, calme et chaud, mais qui ne peut que lui rester interdit, encore et toujours, car il n'a personne pour le prendre par la main et pour le guider sur cette route du bonheur...

D'autres enfants passent près de lui en courant, sans le toucher. Il ne les voit pas, car il ne peut tourner la tête - c'est un rêve ! - mais il les sent le frôler de leurs ailes toutes en plumes d'amour...

"Maman, maman... Papa, papa..." Crient les chanceux, crient les heureux... Ils ne les entends pas, mais il sait que ce sont ses mots là qui sortent de leurs lèvres. Il le sait car c'est ce que tout enfant doir prononcer. Il essaie de les dire aussi, mais sa bouche reste muette. Il réalise qu'il ne sait pas ce que ces mots là veulent dire vraiment...

Il sent une grosse boule se former dans sa gorge, il se débat dans ce rêve d'où il ne peut sortir, prisonnier d'un voile blanc qui lui ferme les yeux et lui bouche les oreilles... Non, non... Je veux m'éveiller, je veux retrouver la réalité de la nuit, plutôt que la chimère de cet enfer trop blanc...

Trop blanc, trop chaud... Etouffant...

Il a soif, l'enfant sans ailes...

Il a soif d'affection...

Mais il n'a que ses larmes pour se désaltérer.

L'enfant avait murmuré dans son sommeil. Des mots tout simples. Des mots habituels aux enfants de son âge. MAis ces mots déchirèrent le coeur de celui qui se penchait doucement sur son lit pour veiller sur son sommeil.

-Maman.. Maman...

Puis le garçonnet s'était agité de nouveau, sa respiration était devenue plus haletante et ses joues pâles rosirent.
Penché sur lui, VAudois retint un soupir.

- Maman...

Il se redressa silencieusement et vint s'acouder à la fenètre, l'esprit au loin. Quelle ironie...! Cet enfant n'avait pas de mère... Tout comme lui... Saurait-t-il un jour pourquoi il avait été délaissé, abandonné? L'image de la jeune femme sur la gravure que lui avait présentée Aramis revint hanter les pensées de VAudois. Il se retourna de nouveau vers l'enfant. Peut-etre que, quelque part, une autre jeune fille, sur une autre gravure, n'avait pu accorder à cet enfant tout l'amour dont il avait besoin.

La petite forme blanche ne gémissait plus, mais avait enfin sombré dans ce sommeil profond et sans nuage propre aux enfants de son âge. Les yeux du gentilhomme protestant s'éclairèrent alors d'une lueur douce.

Quand Mme Brindvak monta dans la chambre voir si M. Vaudois désirait quelque chose, elle le trouva assis devant la fenètre, le visage baigné de lune tourné dans la contemplation muette du petit ange blond aux cheveux soyeux, dont il lui avait confié la garde, depuis un an déjà. Il lui sembla voir deux anges, l'un sombre, l'autre de lumière. Le bruit de ses pas tira Vaudois de sa rêverie. Il tourna lentement la tête vers la nourrice, et, dans un sourire d'une indicible douceur, appuya un doigt sur ses lèvres, avant de se lever et de prendre l'enfant entre ses bras.

LA nourrice allait se récrier, mais VAudois secoua lentement la tête. La douceur qui irradiait de son visage laissa Mme Brindvak muette. Et VAudois sortit de la petite chambre, en emportant l'enfant entre ses bras.

Mme Brindvak retrouva enfin la parole et se lança à la poursuite de son employeur, dans l'escalier.

-Mais monsieur, où emm'nez-vous le petiot? Pourquoi? Que faites-vous donc? Mes services ne vous conviennent-ils pas? Est-ce que je n'ai pas toujours pris soin du petiot ?

Vaudois n'écoutait pas le bruit que faisait derrière lui la tapageuse nourrice. Une seule pensée le préoccupait à présent. Comme cet enfant était léger... Etrangement, l'idée que seuls les anges pouvaient être si légers traversa son esprit. Si léger... et si fragile aussi. Avec une tendresse et une douceur infinies, Vaudois descendit précautionneusement les marches de l'escalier, attentif à ne pas éveiller l'enfant.

Derrière lui, la nourrice le poursuivait encore en faisant de grands gestes.

-Monsieur!!! QU'est-ce que j'ai bien pu faire pour vous déplaire? Où l'emm'nez-vous?

VAudois monta en selle, serrant toujours entre ses bras le petit être. Il eut un nouveau sourire: décidément, le petit ange, si léger soit-il, avait un sommell bien profond.

-Monsieur!! Monsieur!! MAis que faites-vous donc?!! Le poursuivait toujours la digne Mme Binrdvak, exaspérée par ce silence et indignée par l'attitude du gentilhomme.

Sans mot dire, toujours serrant le petit corps frêle contre sa poitrine, VAudois jeta au pied de la nourrice une seconde bourse, dont la vue miraculeuse fit enfin taire la brave femme.

Puis il partit au galop, emportant contre lui l'enfant..

Le rêve blanc s'en était allé, et à présent il n'y avait plus que le repos. Rien que la paix. Mais peu à peu, du fond de l'inconscience, quelque chose s'agita. C'était tressautant, mais régulier. Cela vous berçait, mais vous raccrochait à la réalité en même temps.

L'enfant blond battit des paupières, tiré du sommeil par le trot du cheval, et mis quelques instants à réaliser qu'il n'était plus dans son lit. Il avait la joue enfoui contre quelque chose d'aussi chaud que son oreiller, mais de plus rude. Sous lui, là où se trouvait habituellement son sommier de bois, c'était quelque chose d'aussi dur, mais qui bougeait. Et à la place de la chaleur humide de la chambre, c'était un vent frais et vif qui fouettait son visage.

Il se redressa brusquement, soudain totalement réveillé. Il était à cheval ! Effaré, il se retourna et aperçut qu'il chevauchait dans les bras d'un homme adulte. Les premières lueurs de l'aube qui pointait à l'horizon lui permirent de distinguer vaguement ses traits.

-M... Monsieur Vaudois ? Balbutia t-il, extrèmement surpris

L'enfant avait bougé entre ses bras, il avait poussé un soupir et brusquement, quittant tout à coup les vapeurs du rêve, avait ouvert de grands yeux, à la fois étonnés et horrifiés, qui fixaient VAudois, chargés d'interrogations.

-M... Monsieur VAudois, balbutia-t-il.

Vaudois baissa son oeil unique vers le garçon.
-Chut, enfant, ne sois pas effrayé, murmura-t-il doucement.

A vrai dire, l'enfant, passé l'instant du réveil, n'avait pas peur. Mais il était profondément surpris : que faisait-il, à cette heure, entre les bras de cet homme qu'il n'avait vu que quelques fois chez sa nourrice? Pourtant, bien vite, fatigué par ce mystère dont trop de clefs lui manquaient, il ferma les yeux et respira l'odeur qui se dégageait du pourpoint sombre du cavalier. Une odeur qui l'apaisa sans qu'il sût vraiment pourquoi.

Vaudois continuait à galoper. Il se sentait porté par des ailes et, lorsqu'il sentit le petit corps s'aggripper à lui en frissonnnant, il éperonna de plus belle, presque avec rage, pour atteindre plus vite Marly.

Dès qu'il attint les bords de la Seine, il arréta son cheval en cavalier consommé, tirant sur la bride d'un geste nerveux et précis, et il regarda la rivière qui s'étendait en miroitant paresseusement à leurs pieds.

-Allons, John, vous pouvez ouvrir les yeux, nous sommes arrivés.

(HJ : john francis ? est-ce lui ?)

(HJ: Sherlock Holmes a encore frappé ^^ mdrrrr!)

(hrp: Rhhha, Artagnan, mon ami, on ne peut rien te cacher!! loool)

(HRP: est-ce une" bonne" surprise, au moins? )

L'enfant, que pour la première fois depuis une éternité, quelqu'un venait d'appeler par son véritable nom, ouvrit en effet les yeux, et aperçut le long ruban d'argent qui coulait à leurs pieds. Cette image lui rappela son rêve, le temps d'un battement d'aile de papillon, mais aussi fugace qu'amère, la vision se dissipa bien vite.

Pourquoi l'avoir amené ici ? Il se tourna, un peu inquiet, vers M. vaudois, le gentilhomme qu'il savait être son tuteur, et payer la grosse Mme Brindvak pour qu'elle s'occupe de lui.

-Euh... Monsieur... Pourquoi ? Que... ?

L'étonnement du garçon aux cheveux d'or pur amusa VAudois.

-Eh bien, ne souhaitez-vous pas nager un peu, John? Cette journée est entièrement vôtre!

L'enfant écarquilla les yeux, et aussitôt l'émerveillement y brilla dans un éclat intense.

-Pour...moi? Demanda-t-il timidement.
-Pour vous, enfant. Ne souhaitez-vous pas pouvoir vous amuser un peu, comme tous les garçons de votre âge?

Vaudois lui envoya un sourire et souleva légèrement le garçonnet pour le poser délicatement à terre, avec une douceur dont on eût pu le croire incapable. Puis, il mit pied à terre à son tour, attacha la bride de son cheval au tronc d'un arbre, et se retourna.

John était absorbé dans la contemplation du miroitement des eaux, et ses yeux brillaient d'excitation. VAudois sourit.

( HJ : connectée pour deux minutes sur un ordi qui rame, je sais pas si j'aurais le temps d'écrire le plongeon en entier ^^;;;;;; )

John s'était penché au bord de l'eau, et admirait son reflet onduler en même temps que l'eau.

-On dirait un miroir d'argent qui respire... Murmura t'il.

Il se tourna de nouveau vers Vaudois, qui était descendu de cheval. Le jeune garçon avait beau le regarder, encore et encore... Il avait l'impression de ne pas le reconnaître. C'était un homme grand et fort, au sourire léger mais sincère, et au regard apaisé. Il n'avait plus rien à voir avec le sombre et taciturne puritain, muet et toujours froid, qui était venu parfois voir John dans le passé. Il semblait... changé.

Et puis... Pourquoi ici, pourquoi maintenant, pourquoi lui ?

John baissa le nez tandis que Vaudois s'approchait de lui.

-Euh... Monsieur ?

VAudois s'était allongé dans l'herbe, pour la première fois serein, depuis tant d'années. Les bras en croix au dessous de sa tête, il s'imprégnait de toutes les odeurs, de toutes les couleurs que faisait naître dans le ciel l'aurore de ce jour si neuf.

Il tourna le visage vers l'enfant et le dévisagea en souriant. Vaudois s'attendait à lire cette lueur d'étonnement dans les yeux du garçonnet. Il avait également espéré rencontrer cet éclat particulier que fait naître l'émerveillement dans l'oeil d'un enfant. Son coeur s'était réchauffé à cette idée.

L'enfant s'était retourné à demi vers lui.
-Euh... Monsieur?
-Oui, John, qu'y a-t-il?

John sentit quelque chose venir réchauffer son visage et sa peau, si froids depuis tant d'années. Il rougissait.

-Je... Je crois que je ne sais pas nager...

VAudois regarda l'enfant, avant d'éclater tout à coup, avec une franche hilarité. Il riait à gorge déployée devant la mine déconfite de l'enfant.

Il se releva d'un bond, et s'approcha de John, devant lequel il posa un genou à terre. La main sur l'épaule de l'enfant, il carressa un instant la nuque blonde d'une main légère et approcha tout doucement ses lèvres de son oreille.
-Vous allez voir, John, vous allez apprendre très vite.
Il lui renvoya un sourire apaisant.

Mais, avant que l'enfant n'ait le temps d'ouvrir la bouche, il l'avait saisi par la taille et le jeta à l'eau.

John avait vu le gentilhomme se pencher sur lui, il l'avait sentit l'attrapper doucement et lui murmurer des paroles gentilles à l'oreille.... Et d'un seul coup, il s'était sentit soulevé de terre et projeté en arrière, avant d'atterir dans un monde froid et sourd, et surtout, liquide.

On l'avait jeté dans la Seine !!

Instinctivement, l'enfant avait crié et commencé à se débattre, faisant de grands gestes désordonnés pour ne pas redesendre, pour ne pas se laisser engloutir, pour toujours voir le ciel et rester à la surface. Sur la berge, là bas, il voyait Vaudois qui l'observait tranquillement, souriant. Alors que lui n'avait pas du tout envie de sourire, car ce qu'il vivait, c'était une lutte de chaque instant, un effort permanent à forunir pour ne pas se noyer.
John Francis sentait ses forces commencer à le trahir, et encore une fois par instinct plutôt que par reflexion, il redoubla d'énergie.

Vaudois observa un instant l'enfant se débattre de toutes ses forces et crier. Il agitait les bras en mouvements désordonnés. Et, sur la rive, Vaudois lui souriait.

Il guettait cet instant où l'enfant réaliserait qu'il lui fallait coordonner ses mouvements, qu'il fallait dominer sa peur et garder son calme.

Pourtant, le sourire de Vaudois se fit progressivement un peu plus inquiet. L'enfant ne parvenait pas à se calmer. il se débattait toujours, en pleurant, en criant, et l'eau venait parfois étouffer ses hurlementa affolés.



Brusquement, la petite forme agitée et vagissante disparut tout à fait de la surface de l'eau.

Sans réfléchir plus longtemps, VAudois arracha son pourpoint et se jetta à l'eau.

( HJ : Eh oui, Caliméro a merdé, lol )

John avait cessé s'agiter, et lentement, se sentait quitter la surface pour les profondeurs. Que se passait-il ? Il avait les yeux ouvert, il voyait, pourtant... Mais il n'entendait rien, comme dans son rêve... Un monde sourd et aveugle à lui même...

Pourtant quelque chose était différent... Dans ce monde ci, il sentait son propre corps, il sentait qu'il pouvait bouger... Il agita un peu les jambes et tendis la main vers la lumière que l'on voyait briller à travers le rideau de la surface. Peut être qu'en tirant son corps vers le haut...